Tower of London, March the 15th, 1469
To Lady Kateryn, “my enterly belovid wiff”,
Toutes mes pensées vous sont destinées à ce moment où je devrai quitter Londres pour quelques jours pour une affaire diplomatique et commerciale. Je vous épargne les détails mais je crois que votre frère Richard sera lui-aussi du voyage. Ne vous hâtez point de partir de Warwick Castle et savourez pleinement votre présence auprès de votre Famille. Je sais comme vous aimez vous retrouver parmi eux et revoir ces terres qui constituaient tout votre royaume à diriger étant enfant! À ce propos, embrassez-bien les nôtres, veillez sur eux pendant mon absence. Transmettez-leur tout l’amour que j’ai pour eux, ma bienveillance et mes salutations. Aussi je vous implore de ménager votre santé et ne vous épuisez point en vain vu votre état. Seul Dieu sait si vous offrirez une petite sœur ou un petit frère à nos deux beaux garçons qui demeurent à ce jour les témoins vivants de notre heureux mariage. Votre frère désirait que je vous transmettre ses salutations sincères et je me joins à lui pour saluer le reste de votre fratrie.
Je suis heureux de pouvoir vous écrire avant notre départ. En tant que Master of the Mint, j’ai pu régler quelques détails ici avant de partir et à titre de Lord Chamberlain, tout est fin prêt! Vous savez probablement mieux que quiconque combien j’aime m’assurer que tout soit en ordre et préparé. Je suis certes calculateur mais c’est ainsi que je parviens à remplir toutes mes fonctions et être le fidèle allié et ami de notre Roi. Voilà longtemps je crois que l’on peut me qualifier d’être le meilleur ami d’Edward IV. Vous ai-je déjà raconté que je l’ai connu alors qu’il avait à peine sept ans et moi seize. Comme mon père avant moi, j’entrais au service de la Famille d’York, mes lointains cousins, et bien qu’au début je m’occupais d’un autre de ses frères c’est bien avec Edward que je me m’y à développer des liens. Déjà à cet âge on pouvait deviner que ce jeune homme aurait toutes les qualités qui font de lui aujourd’hui un grand Roi. Ces jours de vie étaient des plus agréables et d’avoir eue la chance d’être leur partenaire de jeux et d’épée demeure un privilège à mes yeux. J’ose croire qu’il est l’homme qu’il est aujourd’hui grâce à des protecteurs comme je l’ai été pour lui.
Vous savez ma bien-aimée, à cette époque je ne pouvais me douter qu’Edward deviendrait le seul vrai Roi légitime mais je m’efforçais de bien remplir les responsabilités qui m’avaient été confiées. Cela vous paraîtra peut-être curieux mais à ce moment de ma vie j’étais loin d’être l’homme influant que vous avez connu aujourd’hui! Tout comme mon père je servais les York à Rouen. J’ai toujours eu ce dévouement et la rigueur dans mon travail. Lorsque mon père mourut le 20 octobre 1455 je suis alors devenu le chef de ma Famille. Henri VI venait de reprendre le trône et devions rentrer à York pour lui porter allégeance. Voilà pourquoi j’accorde tant d’importance à l’éthique du travail bien fait car c’est grâce à cela qu’à notre retour je fus récompensé en étant nommé High Sheriff of Warwickshire et High Sheriff of Leicestershire. J’héritais à vingt-quatre ans de la position de mon père ainsi que de ses processions en notre Angleterre que j’aime tant. Nous allions vivre quatre années de paix relative avec les Lancaster. Si ma fidélité envers la Famille d’York était déjà connue de tous, je pus dans l’exercice de mes fonctions prouver ma grande compétence dans les affaires d’États. Sans soucis je m’imposais comme un High Sheriff compétent, un protecteur pour ma Famille ainsi que dans mon rôle auprès des York. Si nous avions pu savourer des temps de paix, nous savions tous très bien qu’elle n’était pas éternelle! J’avais vingt-neuf ans et j’allais être aux premières loges de cette guerre. J’allais être un témoin de l’histoire dans un siège aspergé de sang de toutes parts!
À cause de mon éternelle fidélité envers les York je fus déclaré traitre à la couronne! On me destitua de tout mais ma famille était parvenue à se réfugier chez un oncle au nord de la frontière près de l’Écosse. Pendant que mon frère Richard pu s’occuper de notre famille là-bas, moi je fus nommé par Richard Plantagenêt père comme étant le protecteur d’Edward. Nous étions sous le commandement militaire de Lord Salisbury votre père et nous étions prêt à nous battre jusqu’à la mort pour rendre les honneurs à nos Familles. Grace à notre courage et à notre détermination nous avons pu rendre justice à nos noms! Hélas, se fut au dur prix de plusieurs vies humaines… D’abord votre père victorieux à Blore Heath en feignant une retraite! Si vous nous aviez vus anéantir la cavalerie des Lancastriens! À la deuxième charge se fut au tour de leur commandant, le baron d’Audley, de trouver la mort… On raconte que l’Hemptill Brook’s river qui partageait le champ de bataille, a coulé du sang rouge trois jours durant… Vous me pardonnerez tant de détails ma chère Katherine mais je vous sais d’assez fort caractère pour supporter la vérité. Avec votre père, nous avons poursuivi les Lancastriens en déroute sur plusieurs kilomètres tout en sachant notre victoire!
Depuis Londres, nous avions à ce moment une mince lueur d’espoir que la guerre se termine avec l’acte d’Accord fait par le Duc d’York. Se fut de courte durée vous le savez bien ma chère femme car à ce moment, les terres de votre père ainsi que de Richard Plantagenêt étaient pillées par les Lancastriens sous les ordres de la Reine Marguerite d’Anjou. Nous devions réagir et alors que votre frère Richard resta pour garder Londres, nous allions de notre côté rejoindre la forteresse de Sandal près de Wakefield. Oh ma Katherine… La bataille fût si terrible! Le Duc d’York croyant à une opportunité se lança dans un assaut qui failli tous nous tuer! Comme les mots me manquent pour vous exprimer la peine que j’ai éprouvé ce jour-là! Richard Plantagenêt, son fils Edmond ainsi que votre père connurent le destin dont vous connaissez… Le Duc d’York, le Comte de Salisbury votre père, sont mort à quelques mètres de moi oh ma bien-aimée… Je n’ai pas pu tous les protéger… Je n’ai pu tous les sauver… On m’avait confié la protection d’Edward notre Roi et j’ai pu malgré l’encerclement de nos troupes par l’ennemi, l’extirper de cette bataille qui n’est qu’un triste souvenir tant qu’à moi.
Je suis certain que les Lancastriens nous croyaient vaincu! Edward, Richard votre frère et moi-même étions toujours vivant et nous étions bien décidés à supporter le poids de nos armées! Nous étions divisés en deux armées principales : celle de votre frère à Londres et celle où j’étais commandé par Edward lui-même succédant à son père. En chemin, nous avons eu l’occasion de barrer la route à une fraction de l’armée Lancastre à Mortimer’s Cross. Sous l’apparition de trois soleils (je vous le jure et je me joue point de vous, il y en avait bien trois! Je n’oserais vous mentir de peur de me voir maudit par vous si vous appreniez la vérité! ) nous savions que ce signe était un présage de notre victoire! Le Roi a mené la bataille et je m’y suis surpassé une fois de plus. L’armée Lancastre périe et Owen Tudor y trouva la mort. Cette bataille nous causa du retard qui nous fut néfaste lorsque votre frère tenta d’empêcher l’armée Lancastre de s’approcher de Londres. Si on raconte que votre frère fut vaincu à la seconde bataille de Saint-Alban et qu’il en a perdu son prisonnier le Roi Henri VI, dites-vous ma chère femme que ses actions lui ont valu toute la reconnaissance de Londres!
Après Saint-Alban, le Reine Marguerite d’Anjou hésita suite à notre victoire à Mortimer’s Cross à s’en prendre à Londres. Vous connaissez la suite… Votre frère hérita de son surnom de « Kingmaker » alors que nous étions enfin réunis de nouveau dans la capitale. Edward fut proclamé Roi Edward IV! Enfin l’Angleterre avait un Roi fort et fier pour la représenter! Avec nos forces réunies, nous avons défié l’armée Lancastre à la bataille de Towton. Le Roi Edward était bien présent au centre et sur les premières lignes de son armée principale et j’étais une fois de plus attitré à sa protection personnelle. Votre frère avait notre aile gauche et Fauconberg l’aile droite. Jamais notre beau pays n’avait connu une bataille telle que celle-ci! Les Lancastriens ont tout fait pour briser les lignes de votre frère mais il a tenu bon! Edward et moi sommes venus lui prêter main forte alors que Norfolk rejoignait le combat à droite… Aucun quartier n’était possible et je vous le jure ma bien-aimée, qu’en ce jour, l’Angleterre perdis beaucoup trop de valeureux hommes… Vous savez, j’étais encore couvert du sang de mes ennemis lorsque notre Roi me fit chevalier de l’Ordre de la Jarretière après notre victoire.
Par la suite se fut le couronnement officiel et enfin nous pouvions pousser un soupir de soulagement. Nous avions enfin ramené la paix sur notre patrie votre frère et moi et Edward en était maintenant le Roi! Votre frère et moi furent grassement récompensé de notre dévouement et nous sommes devenus les hommes les plus riches et puissants après le Roi! C’est ainsi que vous m’avez connu lors des quelques rencontres destinées à sceller nos fiançailles. Qui aurait cru avant la guerre qu’un homme tel que votre frère voudrait m’offrir de marier sa sœur! Que de chemin j’ai dû faire pour devenir l’homme comblé que je suis par son mariage le 6 janvier 1462 avec vous! Ce jour demeure l’un des plus merveilleux de ma vie Katherine. J’étais riche, puissant, respecté mais en plus je prenais pour épouse la femme remarquable que vous êtes. Je crois beaucoup en nous ma chère femme et en notre mariage.
Jamais nos querelles au sujet de votre frère ne pourront briser le lien d’amour qui nous uni. Que vous me traitiez de faible et de lâche m’affecte peu… L’histoire de notre époque vous en a prouvé tout le contraire. Ce n’est que votre caractère si difficile et entêté qui parfois vous donne cette impression! Ah je vous entends déjà rouspéter d’ici! Traitez-moi de mou et je vous dirai que vous êtes qu’une hystérique irresponsable de songer à ces sujets dont nous faisons parfois allusion surtout lorsqu’il s’agit de votre frère! Vous savez le respect que j’ai pour votre famille et je me suis engager à les aimer et les protéger de tout mon être… Vous savez aussi tout le respect que j’ai pour votre frère qu’en disent les apparences… Par contre, l’attitude de votre frère est de plus en plus questionnable Katherine et je vous en préviens! Je respecte (contrairement à votre frère) les décisions de notre Roi bien que je ne les approuve pas toutes! Souvent, bien qu’il en soit peut-être inconcevable pour vous, nous sommes souvent d’accord votre frère et moi. Le « Kingmaker » doit par contre apprendre à lâcher prise! Notre rôle est de conseiller le Roi… l’aurait-il oublié? Vous qui êtes l’amante de mon cœur, vous savez très bien que je protégerai jusqu’à ma mort notre Famille et la vôtre mais pour se faire je ne dois pas agir de manière irréfléchie.
Je vous le dis depuis cette Tour de Londres, jamais on pourra m’accuser de traitrise envers notre bon Roi Edward IV! Je suis comme je suis quitte à devoir vous supporter dans vos railleries mais sachez que cet homme vous aime par-dessus tout! Sachez que je souhaite de tout cœur retrouver l’union paisible des premiers jours de notre mariage. Pour nos enfants au moins ma Lady Katherine… Enfin… Vous avez toute ma confiance et j’ai foi que vous retrouverez le chemin de la raison! Si cela ne suffit pas, si encore vous retournez ciel et terre contre moi, je peux vous affirmer qu’à notre rencontre prochaine je saurai vous réjouir de présents qui sauront vous plaire. Vous vous souvenez de cette jeune-fille, Jane Shore… Elle m’a bien conseillé quant aux goûts des femmes et bien que sa présence me fût fort agréable, sachez que même en si jolie compagnie toutes mes pensées étaient vers vous. (Oui je sais, il vous faudra du temps pour ranger vos griffes après cela surtout si je souhaite que ma tête ne soit pas la cible du lancer de ce présent que je vous offrirai.) Vous y parviendrez comme toujours vous disant que nul homme n’a l’amour que je vous porte.
Il est temps pour moi de quitter Londres avec votre frère… Peut-être aurons-nous l’occasion de discuter à l’abri des regards et j’espère pouvoir le modérer… Sinon je prierai pour vous, les enfants et la famille. Je vous ai laissé aussi une cassette contenant suffisamment pour que vous puissiez en mon absence faire quelques dons aux bonnes œuvres qui vous conviendront. Ne gâtez pas trop les enfants mais usez en pour répandre le bonheur autours des êtres qui nous sont chers et dans le besoin. Nous reviendrons bientôt mais sachez que votre caractère épouvantable me manque terriblement… Comme la vie est ennuyeuse sans vos douces mains près des miennes (au risque de les voir griffées!) Écrivez-moi dès que possible pour vos nouvelles que j’attendrai avec impatience.
Je vous embrasse un millier de fois,
Sir William Hastings,
1st Baron of Hastings,
Lord Chamberlain and Master of the Mint.